La basilique Saint-Clément est l’une des plus belles de Rome. Lorsqu’on gravit la colline du Célio, non loin du Colisée, on est saisi par la beauté du lieu, qui a conservé son plan basilical du XIIè siècle, divisé par des colonnes en trois nefs. Un pavement de marbre, des fresques relatant la vie de sainte Catherine, mènent à la mosaïque de l’abside représentant la crucifixion.
Mais le véritable intérêt du lieu — à nos yeux — est en-dessous de la basilique, là où repose … une seconde basilique, datant du IVè siècle. Ce sont ses murs puissants qui soutiennent ceux de la première.
Mais ce n’est pas fini; descendons encore : un escalier étroit permet d’accéder à un troisième niveau (!) qui ramène le visiteur 2000 ans en arrière … ici on reconnaît quelques pièces d’habitations qui ont conservé leur revêtement mural de terre cuite. On entend même le bruit de l’eau qui coule, peut-être une source.
Et c’est avec surprise que l’on découvre sur ce site un petit temple païen, consacré au dieu Mithra : ses bancs de pierre et son autel, sur lequel figure le dieu égorgeant un taureau. Tout est intact, parfaitement conservé des outrages du temps.
Cette petite visite guidée, que vous aurez certainement appréciée pour son intérêt historique, ne peut manquer de provoquer de notre part un commentaire, en rapport avec la Parole de Dieu.
Dans la description qui précède, nous pouvons finalement dire que Dieu, le Dieu censé habiter l’édifice qui lui a été construit, partage les lieux avec un autre. Deux étages lui sont réservés, mais le sous-sol demeure voué à Mithra (esprit de la lumière divine de la religion Mazdéenne).
Cette étonnante cohabitation représente assez bien l’état du cœur de l’homme nouvellement converti, au début de l’œuvre de la sanctification. L’homme charnel est un homme qui ne vit pas dans une consécration radicale, et qui n’a pas permis à la croix de déployer ses effets dans toute sa vie.
Il est certes devenu le temple du Saint-Esprit (1 Cor. 3/16), mais il se trouve encore parfois dans les tréfonds de son être de vieilles reliques, un autel caché, une adoration secrète.
Dieu le sait. Mais cet homme-là est tellement préoccupé des apparences qu’il est capable de construire du neuf sur de l’ancien, de mettre sans souci une pièce neuve à un vieil habit.
Dieu désire un vase neuf, un temple purifié. Il ne sera satisfait que lorsque cette œuvre sera achevée en nous.
Au milieu de tout le Panthéon des faux dieux que l’homme s’est fabriqué, et qu’il serait fastidieux d’énumérer ici, il est une idolâtrie qui se distingue des autres, et qui tire son origine de la chute, c’est celle que l’homme se voue à lui-même, d’une manière très subtile. Ce fut un des arguments du Serpent pour attirer la femme : vous serez comme Dieu — vous serez dieux vous-mêmes, en vous affranchissant de la tutelle de Dieu. La voie de l’émancipation était ouverte, qui mène à l’orgueil et à la rebellion.
S’il est en effet une adoration cachée dans les fondations du cœur de l’homme, c’est bien celle de l’Homme lui-même. Certains ont appelé cette perversion de la voie droite: égocentrisme, orgueil, amour de soi-même.
C’est pourquoi l’appel de Dieu, et les exigences de cet appel nous rendent perplexes. Prendre notre croix chaque jour [Luc 9/23], délaisser nos affections naturelles pour porter sur Lui nos regards et nos espérances, nous arrêtent. Le programme de Jésus n’attire pas l’homme charnel; il ne le comprend pas, tout comme les disciples ne comprenaient pas leur Maître.
Nous cherchons à évaluer ce que nous perdrons en suivant Jésus, et en nous détournant de notre vie propre, mais nous sommes incapables d’envisager ce que nous gagnerons en nous attachant à Lui, car ce n’est pas monté au cœur de l’homme d’imaginer ce que Dieu a préparé pour ceux qui s’attendent à Lui [Esaïe 64/5].
L’autel de Dieu nous semble trop exigeant, et nous ne sommes pas prêts à y déposer notre Isaac, notre bien le plus précieux, c’est-à-dire nous-mêmes, notre vie et notre indépendance.
Ce temps d’hésitations, qui peut se prolonger indéfiniment (la plupart des appelés préfèrent hélàs conserver leur vie, c’est pourquoi Jésus dit qu’il y a beaucoup d’appelés mais peu d’élus) est un temps pendant lequel notre christianisme va revêtir une forme qui ne peut satisfaire pleinement notre Dieu.
Notre cœur mélangé, tiraillé, ne peut engendrer d’adoration en esprit et en vérité, et l’Esprit de Dieu ne remplit pas le temple de notre cœur comme Il le désirerait car, comme la basilique Saint-Clément de Rome, un autre autel que le sien est encore posé, tout au fond de nous-mêmes. Les hommes ne voient pas cela, et nous pouvons avoir une activité religieuse tout à fait honorable, peut-être avec du zèle pour Son œuvre. Mais on ne trompe pas Dieu, et Son regard nous sonde; Son Esprit nous travaillera jusqu’à obtenir de nous la permission de disposer de nous-mêmes comme Il l’entend.
Il ne désire pas que nous nous attaquions nous-mêmes à nos problèmes, mais Il désire que nous Lui remettions les clés de notre maison, reconnaissant en cela Ses droits sur nos personnes — qu’Il s’est acquises par le sang de l’Agneau.
C’est cela, honorer l’Eternel. C’est une déclaration de confiance faite en présence de nos ennemis, qui stipule ouvertement que nous renonçons à nos droits, pour revêtir une autre justice, et accepter sur nous un autre joug que notre volonté propre.
On voudrait nous faire croire aujourd’hui que c’est par beaucoup d’autres choses que nous honorons Dieu, que nous glorifions Dieu. Ne laissons pas notre attention être détournée du but véritable par la recherche des sensations et autres «douceurs» bibliques.
Notre culte intelligent, notre adoration en esprit et en vérité, passent par un autel (c’est pourquoi nous trouvons l’autel avant d’entrer dans le tabernacle), sur lequel l’Agneau sans tache nous a emmenés avec Lui : «Notre vieil homme a été crucifié avec Christ» [Rom. 6/6]. Maintenant donc,«offrez vos corps en sacrifice vivant, saint, agréable à Dieu» [Rom 12/1].
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