Sache que, dans les derniers jours, il y aura des temps difficiles

Avec sa figure en forme de gros coeur blanc, et les deux grands diamants noirs constellés d’or qui lui servent d’yeux, elle m’effraie un peu, ma tante. Il me semble que ce regard fixe me fait mal à la tête quand je le croise trop souvent ; et malgré sa gentillesse, je ne peux m’empêcher de me tenir à distance de son bec.

Comme elle connaît le grec, j’ai été lui demander de me décortiquer 2 Thessaloniciens 2 ; ce qu’elle a fait sur le champ, sans bouger une paupière, ni une page de dictionnaire :

ὅτι ἐὰν μὴ ἔλθῃ ἡ ἀποστασία πρῶτον καὶ ἀποκαλυφθῇ ὁ ἄνθρωπος τῆς ἀνομίας, ὁ υἱὸς τῆς ἀπωλείας,

Hooulou ! ououloo ! Neveu, ἐὰν μὴ, condition impérative, πρῶτον : premièrement, ἀποκαλυφθῇ : que soit révélé.
Hooulou ! ououloo ! Sens limpide : PREMIÈREMENT, apostasie et révélation de l’antéchrist. PREMIÈREMENT c-à-d avant ἡμῶν ἐπισυναγωγῆς ἐπ’ αὐτόν, notre réunion avec Lui. Paul ne dit pas autre chose, et c’est ainsi que tous les hellénistes l’ont compris.

Mais alors, tante Effraie, pourquoi Kakatoès et Toucan répètent-ils sans arrêt que le grand départ doit avoir lieu avant ?

Neveu tu es curieux ! Non seulement tu ne connais pas du le grec, mais si peu la psychologie des oiseaux ! Comment veux-tu qu’ils puissent considérer avoir pu se tromper, après s’être donné pour des docteurs bibliques et avoir enseigné les autres pendant 30 ans? Va lire du La Bruyère ou du La Fontaine, et tu comprendras mieux les oiseaux, et ce que la Bible des oiseaux.
Hooulou ! ououloo !

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Deux chiens qui se croisent dans la rue ne manquent jamais de se saluer ; que l’un soit tout petit et l’autre énorme, n’empêche pas de changer de trottoir et d’aller se renifler. Nous, les oiseaux, notre diversité est à coup sûr aussi magnifique que celle des chiens, à la Gloire du Créateur, mais nous sommes moins démonstratifs ; nous mettons notre honneur à nous occuper de notre propre nid sans avoir besoin d’aller mettre le nez dans celui des autres. Aussi, s’il y a un sentiment qui nous unis tous, c’est bien notre détestation du coucou !

Regardez ce gros et gras fainéant tout de gris vêtu, se vautrer dans le nid d’autrui, en expulsant pour leur mort des oisillons légitimes et sans défense ; et les pauvres parents bernés, de se tuer à nourrir un glouton insatiable !

L’apôtre Paul, lui non plus, n’aimait pas les coucous. Il le fait savoir dans les termes les plus vifs aux Thessaloniciens : « nous n’avons mangé gratuitement le pain de personne … que si quelqu’un ne veut pas travailler, il ne doit pas non plus manger. Car nous apprenons qu’il y en a quelques-uns parmi vous qui vivent d’une manière déréglée, qui ne travaillent point, mais s’occupent de choses vaines. »

Mais par quels discours ces « chrétiens » coucous étaient-ils parvenus à vivre sans travailler, et à se laisser nourrir par les autres. Les premiers chapitres nous l’apprennent : ils troublaient l’église de Thessalonique en affirmant que la fin était arrivée. Et pour accréditer leurs fausses prophéties, ils n’hésitaient pas à les attribuer à Paul lui-même : nous vous prions, frères, en ce qui regarde l’avènement de notre Seigneur Jésus-Christ, et notre réunion avec lui, de ne vous pas laisser aussitôt ébranler dans votre entendement, ni troubler, soit par une inspiration, soit par une parole, soit par une lettre qu’on dirait venir de notre part, comme si le jour du Seigneur était là.

Bien loin donc de répandre le bruit que l’enlèvement avait déjà eu lieu, (puisqu’ils attribuaient une lettre ou une parole à Paul, qui lui n’aurait pu manqué d’être enlevé) ; bien loin de répandre le bruit que l’enlèvement n’aurait finalement pas lieu (puisque toujours ils faisaient parler Paul), ces coucous faisait courir le bruit que l’enlèvement était imminent ! au point qu’il était devenu inutile par conséquent de vaquer aux tâches quotidiennes.

Qui, dans toute l’histoire de l’Eglise, a troublé les chrétiens avec le retour du Seigneur : ceux qui enseignaient que l’enlèvement n’aurait pas lieu, ou bien ceux qui enseignaient qu’il était imminent ? Quelle secte s’est jamais fait un nom en prétendant que l’enlèvement avait déjà eu lieu ? Aucune ! cette absurdité n’a jamais été que la tentative désespérée de coucous pompeux pour écarter le sens simple et évident des paroles de l’apôtre.

Aujourd’hui, vingt siècles après, alors que les événements annoncés par le Seigneur sont sans doute extrêmement proches (mais bien sûr on ne peut jamais chiffrer), les coucous fréquentent toujours les églises. Le style des jeunes est naturellement plus déjanté. Mais les vieux sont toujours là ; on les reconnaît infailliblement à leur rengaine de pendule du 19ième : Coucou ! Coucou ! ils n’ont jamais su répéter autre chose.

Cependant, je dois le dire, si l’oiseau est détestable, son chant simplet au fond du bois procure toujours un plaisir surprenant. N’est-il pas le signe que la belle saison à la porte ? Vilain coucou, tu te caches trop bien derrière ton fatras volé à droite et à gauche aux auteurs plymouthistes, pour qu’on t’empêche de nuire, mais tu as raison : l’été est proche, et c’est l’essentiel.

Scarron.

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